Une hypothétique longue vie
On vit de différentes manières de différentes façons
On choisit la vie
Ou
On la subit ?
C’est le bilan tout à la fin
Qui nous le dit
D’abord les années de l’insouciance
On n’arrête pas de dire, c’est mieux l’enfance
On vit sans crainte ni méfiance
Tout est à la charge « des grands »
Quand quelque chose manque
On boude mais vite tout reprend
Le temps est long et lent
On peut faire mille et une chose pendant longtemps
On se tape à l’oeil, on écarquille les yeux pour bien voir
Et on imite l’autre qui a l’air de tout savoir
Déjà à vingt on veut changer le teint
Le plus blanc veut ressembler à l’africain
On fait cramer sous le soleil la peau
Et forcer la nature à nous rendre beaux
Dans l’insouciance on veille tard
On se lève très tard
Et on rouspète pour n’avoir pas
Trouvé sa part
À trente on se sent mûr en se tâtant
Alors on s’engage pour le bien et le pire en se mariant
Certains diront non pas maintenant la vie est encore devant
D’autres désespèrent déjà de ne croiser aucun prince charmant
Ni âme sœur même parmi les passants
À cinquante on a fait la moitié du chemin
La maison les enfants et le traintrain
Qui s’installe durablement au quotidien
Des questions surgissent au sujet du conjoint
Alors le diable s’en mêle et fait pousser des pépins
Souvent la raison arrive à redresser le chemin
Mais dans certains cas la veille annonce l’absence du lendemain
Pendant qu’ailleurs on pousse un ouf en rattrapant le train
En se disant mieux vaut tard que jamais, enfin !
Ne rien faire de mon corps et de mes mains
Dieu merci j’ai ma place dans la vie même si c’est un strapontin
À soixante-dix on se sent un peu vieux, on écrit ses mémoires
Et on se rend compte qu’on a survécu à tous les déboires
C’est une réussite d’être arrivé jusque-là
Ça paraît long mais c’est un claquement de doigts
À cet âge tout est bénéf, on peut même vivre selon sa propre loi
On s’attelle alors à fructifier ses passions en restant passionné
Évitant de ressembler aux autres qu’on appelle « les retraités »
On ménage sa santé si déjà on a une canne
On fait le nécessaire pour que le « moteur » ne tombe pas en panne
Et on chérit le temps qui reste et la vie dont on est de plus en plus fan
On pense surtout à certaines perspectives, prématurément apeuré
On a peur surtout de devenir une tare pour la société
Un surplus humain un déchet
Une pléthore qu’on aimerait ranger
Dans un établissement pour personnes âgées
Un fardeau même pour sa famille bien-aimée
On veut rester indépendant et surtout autonome et léger
Aimant, toujours grégaire et toujours aimé
Au moins en compagnie fidèle et bien attachée
À quatre-vingt-dix on est encore sur ses jambes ou à terre
Avec un peu de chance pas sous terre
Dans l’aisance ou la misère
Encore bon vivant et bien lucide
ou avec une mémoire déjà vide
Bien entouré
Ou seul et bien isolé
À réfléchir si ça vaut la peine de continuer
Une fois avoir perdu ses forces et recouvré toute sa spiritualité
Que reste-t-il à part cette sensation
Qui n’a rien de glorifiant
D’être encore jeune de 20 ans
Que ceux qui ont déjà 110, et à plein temps
Et que d’après certains dires
Ils détestent la vie à en souffrir
Déjà ils ont perdu à jamais le sourire
Disent qu’il vaut mieux partir…
Et le pire
Ils commencent à avoir peur de ne pas mourir
W.S. 04.09.24