Le monde à l’envers

On parle souvent du monde à l’envers…
Et si on ouvrait grand les yeux, on le verrait bien retourné

Et puis un jour
Le soleil se lève à l’ouest
On se met debout d’un geste
On s’étire en marchant
Et on a l’impression
Que nos pas reculent en avançant
Tout paraît normal, pas de place au soupçon
On est bien à l’envers
Accroché par nos pieds aimantés à la terre
Avec les cheveux au vent
Et l’air bien con

On rit quand on a envie de pleurer
Et on pleure dans les fêtes où il n’y a désormais
Nulle place pour danser
Ni chanter..
On ne peut que chuchoter, grommeler, murmurer
On inventa même la mode de se taire à jamais

On appelle le médecin
Bonjour docteur aujourd’hui je me sens bien
Je suis souriant heureux sans le moindre brin de chagrin
Cette euphorie m’inquiète, aidez-moi à y mettre fin

J’allume la télé pour voir les infos
M’assurer comme d’hab, que tout est faux
Des simples faits divers à la météo
En passant par les guerres la bourse et les résultats du Loto

Rassuré enfin
Au moins pour cette nuit jusqu’à demain
Qui commence toujours par un matin
Point de départ d’un nouveau train train
Je rêve me réveiller au chant du coq et aux cris des forains
Mais ce n’est jamais le cas
Et c’est aux klaxons des riverains..
Je prends mon courage à deux mains
Pour faire la corvée du quotidien :
Lire un chapitre de mon bouquin
Celui que j’ai commencé par la fin
Sans passion et sans entrain
Sans envie ni plaisir aucun

Mon bouquin raconte la mort
de l’intelligence
De l’aisance et de l’abondance
Qui fait place à la souffrance
À l’arrogance et à l’outrecuidance

Il parle de la fin des temps
De l’espoir meurtri qu’on avait avant
Il décrit l’histoire à venir on ne sait quand
Comme une absence d’avenir pour nos enfants
Un monde de l’inexistant, complètement absurde et effrayant

Le monde du binaire
Caractéristique principale de notre ère
Où l’amour est marchandise
De la valeur d’une friandise
Quoi que l’on dise

À la pauvreté du verbe
Des philosophes en herbe
S’ajoute l’étroitesse de l’esprit
De la vision unique et du mepris De tout ce qui librement et différemment entrepris

On nous a appris à se mettre en transe
Mettre l’énergie au repos, comme en vacances
Ne se soucier que de l’obéissance
Et être toujours prêt même pour une éventuelle et subite partance

Toujours en attente de l’ordre transcendant
Qui nous parle par le biais de l’implant
Greffé en serie chez tous les gens
Lors de la pandémie aux effets néfastes et incessants

On nous a appris à voir flou
La beauté les couleurs même les beaux bijoux
Sentir rêche et rugueux ce qui est doux
Même devant l’évidence, ‘ fallait réinventer la roue

Dans les moments de peur on se trouve presque obligé
De jouer à la roulette russe et espérer
Qu’on a fait le bon choix basée sur l’idée
Du pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué

Le vent inverse son tourbillon
Rassemble la poussière et la repose délicatement au lieu de la disperser
Ci et là
Sur les pare-brises et les parquets
Les claviers et les écrans télé
Sur les bijoux cosmétiques montres et bracelets
Quand tout est poussiéreux et bien enrobé
L’homme de ménage s’endort satisfait avec le sentiment que le travail est fait

On discute les valeurs et du monde idéal
En émettant le doute sur la clarté de la lumière et des étoiles
On travestit le bon sens en multipliant les amalgames
On dit que la propreté elle-même pourrait devenir sale ?

On fait une fixation sur le voile
Convaincu jusqu’à la moelle
Que cet accoutrement en soie ou en toile
« Sciemment ostentatoire »
Offense la laïcité et sa « morale »
Pendant que d’autres se mettent carrément à poil

Les geeks les nerds et les « nolife »
Las des consoles et gadgets
Veulent encore moins se prendre la tête
Entre deux pauses ils doublent la dose
Pour eux la vie n’est qu’un jour de fête
Ils se dégourdissent les jambes en allant aux toilettes

L’intelligence change de règne
Déserte le corps de l’homme en le mettant en quarantaine
Et qui devient vide comme le drap d’un fantôme
Son âme titube trébuche puis s’auto-consomme

Des hommes amoureux des guerres
Cherchent le meilleur savoir-faire
Pour revenir à l’âge de pierre
Et mourir tristement fier
D’avoir tuer la terre juste en empoisonnant l’air et la mer

Devant cette prise en otage de la nature et ses avantages
Les oiseaux désertent les branchages survolent les marécages
Et cherche désespérément à rentrer en cage
Et en finir avec la vie libre et sauvage

Dieu merci la vie ne peut pas être que vile et vaine !

Alors… comment finir avec ce cauchemar ?

Il suffit d’adopter l’autre façon de voir
Qui détourne le regard
Et le pose sur le « haut du perchoir »
Dominant l’horizon à la ronde
Symbolisant une fronde
Prête à reconquérir le monde
En renforçant la foi et en ressuscitant de l’espoir à chaque seconde

L’intelligence est apparue ailleurs Les ennemis d’hier
Se côtoient aujourd’hui pêle-mêle
Chats et rats, caméléons et sauterelles
Loups et poules grands et petits mâles et femelles
Pour manger dans la même « gamelle »
Nul besoin de prière ni de rituel
L’intelligence leur sied bien, ils lui font la part belle

Avec un peu de chance
On réapprendra la vie ses codes et son intransigeance
Quant aux règles à respecter et leur constance
Et finir de jouer dangereusement avec la science
Peut-être qu’on arrivera un jour, à sauver… au moins les apparences